Skate or die
C'est toujours compliqué l'adaptation à l'écran des romans. Compliqué parce que chacun des protagonistes, l'écrivain d'un côté, le réalisateur de l'autre, a un point de vue fort sur l'objet du film. L'écrivain déjà parce qu'il a intimement porté l'écriture de chaque ligne et la non écriture de beaucoup de choses, laissant une part de mystère et de rêve aux lecteurs. Le réalisateur ensuite, parce qu'il doit traduire en image une histoire et ses propres sensations. Et quand le réalisateur et l'écrivain sont la même personne, cela ne résoud rien : Michel Houellebecq, dans sa tentative pathétique et un peu désesperée d'adapter ce qui est pourtant à ce jour son chef d'oeuvre (la possibilité du île), renonce au milieu du film et laisse celui-ci voguer vers l'absurde.
Habituellement, étant une plus grande lectrice que spectatrice, je lis les livres, puis je regarde les adaptations. Et je suis souvent critique, ne retrouvant pas restranscrit ce que j'ai pu ressentir. Ce qui logique. L'esthétique du réalisateur prime. De manière quasi inédite, je viens de lire un livre dont j'ai déjà vu l'adaptation ciné. Paranoid Park, de Blake Nelson. Le livre est fantastique, racontant l'histoire d'un jeune garçon, à un âge charnière, qui vit un événement fort qui va modifier sa vie en profondeur. Les images de Gus van Sant (j'ai adoré ce film, comme à peu près tout ce que ce réalisateur a fait, à l'exception du trop métaphorique Kurt) ont bercé toute ma lecture, les images de du skate-park sous le pont ne m'ont pas quittées, chapitre après chapitre. Une expérience intéressante donc : même si intrinsèquement le livre est bon, il est encore plus puissant porté par les images de Gus van Sant, si fortes qu'elles restent ancrées longtemps après avoir vu ce film...